4 July 2007

Eloge de l’ennui


« Soit un peu plus active, bouge ! », « ne reste pas là à ne rien faire » ; « rends-toi utile »… Combien de fois ai-je bien pu entendre ces injonctions dans la bouche de ma mère au temps où, adolescente, la moindre altération de mon univers familier suffisait à me plonger dans une rêverie, certes improductive, mais tellement plaisante… Lorsque j’étais enfant, les rangements saisonniers de notre chambre sous la baguette autoritaire de ma mère duraient des heures ; non seulement à cause du grand désordre accumulé durant ces mois de paresse mais aussi parce que chaque jouet, chaque livre retrouvé dans des endroits inattendus faisait naître entre mon frère et moi des discussions animées voire même des bagarres ou alors une méditation profonde sur les nouvelles perspectives ouvertes par ces objets que l’on croyait perdus à jamais ou dont on avait simplement oublié l’existence.

De fait, mon éducation se partage entre l’influence de ma mère, lève-tôt super active, ayant élevé deux enfants seule et pour ce faire, menant le foyer à la baguette (ma meilleure amie l’avait surnommée « le dragon Lily ») ; et celle de mon père, lève-tôt et couche-tard (avec une sieste dans le milieu), rêveur invétéré, vétéran des projets boiteux et aventureux. La première ne supporte pas de ne rien faire – maintenant qu’elle ne travaille plus, elle jardine furieusement, c’est-à-dire qu’elle fait des trous dans son jardin - ; le second vit assez bien son inactivité, tant qu’il a son quota de dents à arracher (mon père est dentiste) pour pouvoir mieux s’occuper de son temps libre.

J’ai ainsi appris de ma mère qu’il faut utiliser son temps à bon escient tandis que j’ai pris modèle sur mon père pour chérir mes moments d’oisiveté. Li-Chun, dans son article
Free Time, nous rappelle combien parfois nous pouvons être désemparés quand nous nous trouvons soudain sans rien faire, nous voilà avec plein de temps devant nous, pour nous, et l’on n’a rien envie de faire : le nouveau polar de l’été nous tombe des mains, les ourlets des pantalons vont encore attendre un peu et en même temps, l’on ne peut s’empêcher de tourner en rond comme un cafard dans un évier bouché : on s’ennuie, on s’emmerde.

Ca ne fait rien vous dirais-je, au contraire ! Ennuyons-nous ! Tournons-nous les pouces puisque nous n’avons pas d’obligation particulière et que ce temps libre nous appartient… En outre, j’aime parfois n’avoir rien à faire et m’ennuyer car c’est sûrement un des seuls moments où je sens littéralement le temps passer. « Compter les heures », « regarder le temps passer », on ne mesure jamais mieux le temps que lorsqu’on attend, lorsqu’on s’ennuie. Evidemment, avec parcimonie sinon l’on risque de vieillir trop vite !!
Ca vous plairait de découvrir d’autres points de vue sur un sujet similaire ? Jetez un coup d’œil au nouveau focus de l’été sur
eRenlai, intitulé « le Temps et Moi ».
 
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