6 January 2010

Nous sommes tous des junkies

Ce mois-ci, la version en chinois de eRenlai/Renlai est consacrée à l'addiction et aux diverses formes qu'elle prend. En préparation de l'article que l'on m'avait commandé pour ce numéro sur la drogue et l'addiction dans la littérature, j'ai (re-)découvert les classiques: Les Paradis Artificiels de Baudelaire, et quelques ouvrages de la Beat Generation - difficiles, d'ailleurs, à trouver à Taipei -: Junky et The Naked Lunch de William Burroughs (de fait, je n'ai obtenu ces livres qu'après ma deadline et n'ai pu les citer lors de la rédaction de mon papier) et surtout Requiem for a Dream de Hubert Selby Jr. que j'ai relu avec beaucoup de curiosité sans toutefois revoir le film dont, malgré les ans, je garde un souvenir aigu (Qui n'a pas été traumatisé par ce film?!).


Cet article et ces diverses lectures ont été pour moi l'occasion de réfléchir sur le statut de la drogue dans nos sociétés et surtout sa signification politique (au sens des liens et des lois qui régissent la cité). Pourquoi criminalisent-on tellement le commerce de la drogue d'abord et ses usagers ensuite? Et, surtout, cette criminalisation à outrance est-elle la meilleure façon d'affonter et de combattre les crimes et les problèmes liés au trafic de drogue et à l'addiction? Sans toutefois céder à la facilité de la légalisation totale, il y a peut-être un juste milieu à trouver qui implique forcément la responsabilité et le devoir civique de chacun. Un gouvernement éclairé et, qui plus est, doté des moyens financiers de le faire, devrait avant tout instruire et éduquer, plutôt qu'interdire et punir aveuglement, voire écarter encore davantage des populations qui vivent déjà dans les marges de la société. Culturellement et médicalement, nous avons pléthore de raisons pour rejeter les drogues: certaines personalités peuvent être affectées de telle manière qu'elles deviennent dangereuses (bien que le danger soit souvent seulement envers soi-même), les drogues nuisent à la productivité (bien que certaines semblent l'accroître au contraire, tout du moins sur le court terme) et surtout ces substances semblent nous transformer d'une manière qui n'est jamais totalement élucidée, elles relèvent aussi en quelque sorte de notre part d'ombre enfouie dans les connexions chimiques de notre cerveau, mais pas seulement.

Je tiens ainsi à citer l'initiative du Département de la Santé de New York qui vient de faire publier un fascicule de 16 pages à l'intention des héroïnomanes. Intitulé "Take Charge, Take Care", c'est à la fois un guide de prévention et d'information qui donnent 10 conseils et mesures contre les risques d'overdose ou de contamination dues aux mauvaises manipulations des seringues, aiguilles, produits, etc... Ce livret fait l'objet de lourdes critiques car il est perçu par certains comme une incitation à prendre de l'héroïne. En effet, certaines pages ne sont surement pas à mettre entre les mains les plus jeunes, on sait combien les gosses sont aptes aux expérimentations les plus crétines et dangereuses mais il me semble tout de même que c'est mieux que de fermer les yeux sur des pratiques qui existent et qui sont nuisibles car clandestines. Je vous laisse alors exercer votre seul jugement car j'ai confiance en votre capacité à raisonner et à ne pas croire qu'une telle page vous donne envie de vous shooter. 12 pages de la brochure sont disponibles ici.
A lire également sur le site eRenlai: Les Hauts et bas de la cocaïne en français
 
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